vendredi 31 août 2007

Hackamore Brick - One Kiss Leads to Another (1971)



Un seul album en 1970, « One Kiss Leads to Another » rien d’autre, aucune autre marque laissée par ses oiseaux là. mais on pourrait dire que l’album se suffit à lui-même ; un petit miracle.
Ici (un peu à gauche pas loin du cœur) il faudrait parler avant tout de fraîcheur, de la fraîcheur (la candeur aussi) des premières fois, comme si nos oubliés jongleurs de briques mettaient toute leur énergie gracile dans le truc : un concentré de rock doux entre le meilleur Lovin Spoonful et la seconde manière du Velvet… oui vous voyez bien, le Velvet apaisé et frais en apparence ; celui du canapé et de Loaded loin des expérimentations, un grand groupe de rock à l’entrain trottinant. Tout chez Hackamore Brick semble venir naturellement, ces merveilles pop addictives « Radio, i Watched You Rhumba » et cette ballade tire larmes nimbée de guitare raide et de piano électrique tendre (Wurlitzer ?) « Peace has come » , et cette chose intrigante : « And i wonder » orgie inconvenante entre le « Murder Mystery » du Velvet (encore) et les Doors… Bon je m'immobilise stoïque là car tout est pour ainsi dire excellent. Un très beau disque à classer non loin de Jonathan et de ses amoureux modernes, juré craché croix de bois croix de fer si je mens, je vais en enfer… et l'enfer c'est les autres et surtout Kiss.

mardi 21 août 2007

Frank Sinatra – Watertown (1970)

Le disque le plus mélancolique de Sinatra sûrement pas ! Les sublimes « In The Wee Small Hours » et surtout « No one cares » baignent dans le chagrin et les larmes même pas contenues. Le plus déprimé peut-être alors ? En tous les cas un disque fatigué, un peu cassé voire soumis au goulet du temps, juste avant de passer aux moumoutes consolatrices, déjà loin des pistes d’hélico détruites à coup de marteau la rage dans le gosier. Loin de la flamboyance d’Ava des frères culbuteurs irlandais d’une jeunesse de proto idole gommeux de Sam Giancana de sa clique et de la boucherie chevaline, (Toutes ses têtes de chevaux dans les draps satinés de Vegas ça fait tache), voilà donc (on y vient) « Watertown », drôle de bidule, Watertown. Tout d’abord il faut savoir que « Watertown » est un « disque concept » Bizarre idée top moderniste pour remettre l’oiseau dans le jacuzzi... L’oiseau coule t-il dans le jacuzzi ? Enfin pas si sur, car Sinatra était déjà là dans le bain (mais sans bulles) avant tout le monde : Elvis le pelvis, les Beatles, les Doors et même Ravi Shankar... Alors quand Jim Morrison et consorts vibrionnent en Sinatra d’occasion, Frankie the voice, lui, reste dubitatif. Tous ces faux vrais hippies qui montrent leurs attributs en publique ne sont que freluquets et compagnie (le syndicat ne veille pas et Morrison sera trahie par la plomberie.) Lui Frankie (the voice donc) est capable de faire fondre n’importe qu’elle assistance et uniquement par le magnétisme interposé de sa voix et grâce à quelques imperceptibles circonvolutions d’un bassin pourtant encaustiqué par la bienséance catholique… alors les hippies ok ils sont bien rigolos trente secondes mais montrons de quoi nous somme encore capable, donc voilà : Watertown. Pour parvenir à ses fins et écraser les jeunots, Frankie recrute Bob Gaudio producteur dans l’ombre des Four Seasons et plus étonnant, Jake Holmes un chanteur folk un peu obscur qui fera office de songwriter... l’homme du romanesque en somme. Pour le concept et le coté in moderniste (enfin en 1970) « Watertown » raconte bien une histoire, celle d’un homme entre deux ages, abandonné par sa femme et ses enfants, laissé à lui-même et soliloquant dans les rues vides d’une petite ville. (Pas de Shirley MacLaine à l’horizon et s’il y a un torrent, c’est celui d’une pluie qui tombe inlassablement.) L’album est constitué d’une série de brefs instantanés lyriques, comme des lettres écrites et jamais envoyées, gardées au fond de la poche avec le poing par-dessus, et la solitude qui remonte. Introspection nécessaire d’un homme cassé. Sinatra est évidemment un interprète fabuleux et il baigne souverainement dans ce bain là , tout passe par sa voix, la peine, les brisures, l’espoir la résignation…Enfin comme d’habitude... La texture musicale (soyons doctes) est à l’avenant, d’une diversité inhabituelle, on dira pour fixer le lecteur (et potentiel futur auditeur) un genre de folk-rock subtil et idéalement arrangé… des nappes de cordes, des cuivres et flûtiaux lointains, un piano de chez bastringues plus que de chez Steinway et quelques guitares acoustiques mais néanmoins espagnoles versants parfois dans l’électricité voyez-vous ! Les ballades qui sont toutes fabuleuses, baignent dans les sanglots étouffés et il y a sur la fin un « Lady Day » , le « Lady Day » de Frankie, qui vaut bien celui de son confrère intello toxico explicite (à fourrure) de la grosse pomme. L’album sera un retentissant échec commercial et Sinatra pas masochiste (sans fourrure) se recyclera dans la contemplation de son passé et accessoirement sa collection de moumoutes, Goodbye, The Voice… http://www.simpleton.com/20021230.html

samedi 18 août 2007

Alain Bashung - Play Blessures (1982)



Avec « Play Blessures », Bashung passe la troisième : Pochette classieuse de Mondino, paroles classieuses d’un Gainsbourg pourtant peu concerné et sur sa seconde main. Et pour faire un tout cohérent musique … comment dire classieuse ! Peu habituel tout ça sur les planches vermoulues de notre Académie nationale de musique ! Du glabre moite, des mélopées de salles de bains pas aérées, du dada pelvis et lycée de Versailles, des robinets qui goûtent sur les sinus glacés de nos musiciens de studios à catogans abonnés à la chose morne binaire d’ici (ce petit orgue à un doigt, un peu partout est comme une libération) Et ce dégoût dans la bouche mon Dieu ! Grande leçon pour tous les Eudelines aristopunks du secteur.
Nous voilà plutôt donc frôlant la pelote déroulée par Colin Newman plus que la force basque (le fil de Newman viendra plus tard chez Novice) . De la New Wave triturée et pulvérisée au milieu des phrases du petit Lucien ou plutôt une vision du post punk d’ici glissant sur l’émail de la salle de bain et autour du glauque des mots… du Novö raide et saumâtre… Novövison en somme…La classe en somme…

mardi 14 août 2007

Psychogeographie indoor



L’air hagard et un peu chiffonné je me suis réveillé ce matin avec une envie incompréhensible d’arpenter ma bibliothèque, celle-ci me toisant de toute sa hauteur, me voilà donc fortement dépeigné encore dans les limbes et presque sur la pointe des pieds, la tête oblique me laissant aller au gré d’un petit hasard planimétrique… Psychogeographie indoor comme dirait l’autre… Je sais que je vais émettre des banalités, mais je viens de m’arrêter devant deux trois Hemingway et Hemingway est un immense écrivain ! J’en vois qui pouffent dans le fond, grommelant un sourire satisfait en coin : oui ben bof Hemingway ça vol pas haut quand même ! ça invente pas ! et bien mornes chafouins détrompez-vous ! Par exemple, il faut relire ses écrits de journaliste (oui journaliste coco !) En ligne : somme extraordinaire, une moitié de siècle résumée, de la bohême parisienne, des années folles à la guerre froide en passant par l’Espagne... somme ou l’œuvre en maturation dans le pur journalisme des débuts se fait de plus en plus intime. Il y a par exemple ses deux accidents d’avion survenus en Afrique, leur récit assurément très drôle et complètement déboîté, transfiguré par un indéniable filtre littéraire, d’ailleurs Ernest est un bon flirteur, laissant passer du frêle dans du bourru avec toujours cette sournoise bataille entre l’Hemingway écrivain et l’Hemingway sportif, chasseur pêcheur voire plus.... Écrasée entre les huit cents pages de En ligne et le consacré Adieu aux Armes il y a dans ma bibliothèque et surtout du grand Ernest cette merveille qu’est Au-delà du fleuve et sous les arbres : livre quasi-secret et tranquillement funéraire, livre d’adieu au sens propre, livre sur le temps qui passe, sur la vieillesse qui arrive sur l’amour et sur Venise, livre qui éclaire a posteriori la fin tragique du père Hemingway, lisez le merci pour lui…



Et voilà qu’après avoir évité un Blanchot morne et deux trois Cioran aigrelets pour rien, voilà donc qu’après un bref survol de littérature lactescente mon regard focalise inconsciemment sur quelques Giono (s) un peu abandonnés et faisant presque taches… Merveilleuses taches, et là je vais rebanaliser ! Il est courant d’admettre que chez Giono plusieurs périodes distinctes se succèdent : le Giono des débuts, grand panthéiste qui apportait le souffle de la nature à une littérature de l’entre-deux-guerres exténuée par le supposé cogito et la décourageante quiétude des intérieurs bourgeois ; le Giono du milieu assez problématique lui et le Giono de la fin merveilleux, voilà qui est un brin schématique, mais bon bref voilà quoi… À ses débuts il se laisse porter par le lyrisme du vent par le soleil aveuglant, par la pure sensation, cette sensation qui filtre bien autant que les hautes frondaisons de la morne intelligence (froide et lactescente ?), il y a la terre, les rivières, les montagnes et forêts nous ne sommes pas tout : il y a Collines ! Tout d’un coup pourtant (style second) Giono prend l'idée de penser ! Période plus compliquée et aléatoire où notre ami bien seul se complait dans un jargon douloureux et prophétique, se repliant dans un individualisme effrayant, malgré de beaux retours de flamme (Batailles dans la montagne) il faut lutter incessamment avec lui pour parvenir à l’aimer encore, dans le genre pastoral apocalyptique CF Ramuz est bien plus décisif… Pourtant, Giono revient plus haut, plus beau encore ! Simple et un peu première manière avec Les grands chemins, étonnant avec Le hussard sur le toit. Le hussard et son goût de Stendhal, son goût de Dumas père, aussi. Le hussard et ses épidémies de Cholera, ses routes aromatisées de cadavres avec au loin la fumée grasse des bûchers qui s’élève … Le hussard et ses combats au sabre, ses évasions romantiques ses nuits au cœur de la forêt à l'abri de la menace courbée du poison, la téméraire Pauline de Théus … Giono est libéré des orages philosophiques qui embrumaient son style, son esprit ? . C’est un roman merveilleux répétons le, inlassablement… Il y aura aussi Deux cavaliers de l’orage où il ne lance plus de grandes invocations aux arbres les laissant simplement pousser au flanc des montagnes et leurs feuilles reconnaissantes laissant passer, pour lui, les ombres et le soleil.

Me voilà réveillé, mais toujours ébouriffé, êtes-vous alanguis ?

mardi 7 août 2007

Randy Burns - Evening of the Magician (1968)



« Tout n’est pas dur chez le crocodile. Les poumons sont spongieux, et il rêve sur la rive »

Henri Michaux
Face aux verrous

Ces flûtes dépressives comme un lendemain de bad trip. Sur la pointe de la langue encore le goût du gardenal du matin. C’est un disque ESP, le second de Randy Burns, le meilleur. Du Dylan trempé dans l’acide. Des chansons échappées de Greenwich Village qui travaillées dans leur fine masse prennent une tournure lysergique. Un orgue spectral enveloppant comme étouffant les mélopées d’un mince suaire, ces fameuses flûtes mélancoliques, nimbées morbides, qui elles clouent un essemble bien sombre… drôle de crucifixion... L’esprit de Pearls Before Swine aussi mais sans la voix de palmipède asthmatique de Tom Rapp…et de la tristesse, de la tristesse à revendre ! Un disque qui se déploie dans un malaise sage, une inquiétude feutrée, une gravité où chaque note pèse de toute sa densité. Un disque assez peu hilarant pour tout dire….
Oui mais bon voilà j’exorcise car les temps sont mornes, l’été n’est pas là ! L’anticyclone des Açores sifflote ! Vous voyez bien cette dépression de grande étendue censée garder une situation et une forme générale quasi-stationnaire durant une longue période mais qui là joue les dilettantes… Saloperie d’anticyclone qui ne garde plus rien pour lui, saloperie de dilettantes !

Climax :
Echoes of Mary's Song

vendredi 3 août 2007

Désert rouge et chambre verte



Il était déjà mort avant de mourir mais c’est triste . Sacré Michelangelo de beaux trips somnambuliques, la cabane du « Désert Rouge » , Monica dans le brouillard, Alain le charcutier raté éclipsant tout au passage, même le reste de l’ombre là plus loin derrière le rond de lumière, et Jack le timbré tout raide à travers les grilles du travelling avant le plus comment dis t-on tour de force en portugais ? Et les petits culs de « Zabriskie Point » bien mieux que chez Dumont bites apparentes et surtout « Indentification d’une Femme » vrai film bouleversant, vrai dernier film avec du brouillard et des cunnilingus, un testament mieux que Lang et les Hindous… Lourcelles tu te trompe, le prochain sur la liste JLG ? Apres plus rien nada…